Mais pourquoi la lune me narguait-elle ? Que lui avais-je fait pour qu'elle me regarde de ses yeux invisibles avec moquerie . Elle me disait dans sa langue :
« Ah ah, voilà la petite Plume d'Hirondelle »
Voyons, il n'y avait aucune honte à être moi, apparemment... Je me tournais et retournais sur ma mince couche où j'étais censée avoir sommeil. Pourtant, je n'avais pas envie de dormir. C'était plus fort que moi. Les respirations des autres guerriers me résonnaient dans les oreilles et en me levant, j'avais hâte de retrouver les bruits discrets de la forêt froide et obscure. Sans un regard pour la jeune guerrière qui montait la garde, tapie près de l'entrée, je m'engouffrai dans les bois et me mis à courir.
Ne sachant pas où aller, je marchais sans but précis, me laissant guider par le froid rafraîchissant qui me collait à la fourrure et y pénétrait. Soudain, les murets des jardins de la ville se dressèrent devant moi. Quelques chiens, sentant mon odeur malgré la puanteur de la pollution, aboyèrent un peu. Dégoutée par le spectacle des lumières pas vraiment naturelles, je montai sur le petit mur devant moi et commençai à m'appliquer à marcher sans tomber sur l'étroite plate-forme. C'est alors qu'un petit chien parvint à sauter sur moi et à me faire chuter dans son jardin. Me relevant lestement, je griffai et mordis le canidé qui s'enfuit vers sa maison. Le coeur battant pour tous ces bruits inutiles, je cherchai un abri du regard. Ne trouvant qu'un buisson, je me tapis en dessous.